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Refus de prise d'empreintes et d'ADN

1 | Refus de se soumettre à des relevés signalétiques (photos + empreintes)

Ces relevés se font parfois dans le cadre d'une vérification d'identité ou d'audition libre et systématiquement en cas de GAV. Il s'agit de prise d'empreintes digitales, palmaires et photographies.

Dans le cadre d'une vérification d'identité, le refus est puni de 3 mois d'emprisonnement et de 3 750 euros d'amende (article 78-5 du code de procédure pénale)

Dans toutes les autres circonstances, c'est-à-dire à partir du moment où vous êtes soupçonnés d'avoir commis une infraction, le refus est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende (article 55-1 du code de procédure pénale).

  • Cela peut donner lieu à une nouvelle audition lors de laquelle on nous demande pourquoi on refuse le relevé des empreintes digitales.
  • Accepter, c'est être répertorié·e dans le fichier automatisé des empreintes digitales (FAED) et c'est un risque si l’État devient plus autoritaire.
  • En principe, le dossier dans lequel vos empreintes seront enregistrées ne communique pas avec celui où se trouvent éventuellement les empreintes que vous avez données en faisant un passeport / une carte d'identité. En outre, la prise d'empreinte par la police est beaucoup plus large (tous les doigts + paume de la main). Refuser la signalétique au commissariat présente donc un intérêt même si vous avez déjà donné vos empreintes dans un cadre différent.
  • Un arrêt de la Cour de la Cour de Justice de l'Union Européenne du 26 janvier 2023 a considéré que la collecte systématique des données biométriques (empreintes) et génétiques (ADN) de toute personne mise en cause violait une directive européenne protégeant la vie privée. Même si cette décision a été rendu dans le cadre d'une affaire bulgare, on peut considérer que la procédure française ne respecte pas non plus la directive en question, et les juges français sont tenus de suivre cette jurisprudence européenne. La Cour de cassation s'est cependant contentée de reconnaître, dans un arrêt du 29 mars 2023 sur les décrocheurs de portrait, que les poursuites pour refus d'empreintes devaient être soumis à un contrôle de proportionnalité (comme pour l'ADN, mais on imagine que la prise d'empreinte sera plus facile à justifier pour elleux car moins intrusive que l'ADN).

Si une personne est poursuivie pour une infraction passible d'au moins trois ans d'emprisonnement et que cela constitue le seul moyen de l'identifier (car refus de donner son identité réelle), les empreintes et la signalétique peuvent être pris sans le consentement de la personne. Dans ce cas, l'avocat doit pouvoir assister à la prise d'empreinte.

2 | Refus de se soumettre à des prélèvements biologiques (ADN)

Ces relevés ne sont pas systématiques puisqu'ils ne peuvent se faire que si vous êtes poursuivies pour des infractions spécifiques - comme la dégradation. Le relevé peut se faire dans différents cadres (audition libre, gav...), mais plus généralement en garde à vue.

L'article 706-56 du code de procédure pénale punit d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende le fait de refuser de se soumettre à des prélèvements génétiques, c'est-à-dire de donner son ADN.

Dans les faits :

  • Refuser est un délit qui peut augmenter une amende existante.
    Cela donne parfois lieu à une nouvelle audition. On nous demande pourquoi on refuse le prélèvement ADN.
  • Une majorité de militant.e.s la refusent.
    Exemple : Les décrocheurs de portrait de Macron d’Annecy ont reçu une amende de 200€ à 300€ supplémentaires à l’amende pour vol en réunion qui s’élevait à 500€ ; dégradations lourdes à Lyon de militant•es d’xr qui avaient refusé le prélèvement adn, ça n’a même pas été évoqué lors du procès 
  • Accepter, c'est être répertorié·e dans le fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG) et c'est un risque si l’État devient plus autoritaire.
  • Les juges doivent exercer un contrôle de proportionnalité sur l’incrimination pénale du refus de se soumettre au prélèvement ADN -> arrêts c.cass 22 septembre 2021 (ici la Cour relevait le caractère politique militant de l’infraction entreprise dans un but d’intérêt général, et la disproportion entre la faible gravité du délit dont les individus étaient soupçonnés au moment de leur refus du prélèvement et l’atteinte au respect de la vie privée). La jurisprudence va plus loin en relaxant les personnes qui ont refusé de se soumettre au prélèvement de leurs empreintes génétiques même lorsqu’elles ne sont pas concernés par une action politique/militante. Bref, en pratique le risque d’être condamné pour le refus de se soumettre au prélèvement adn est extrêmement faible, en tout cas dans le cadre d’actions de désob.

Vous pouvez demander l'effacement des empreintes génétiques si vous avez été acquitté·e ou au bout de plusieurs années (détails).

Iels peuvent faire se prélèvement à partir de "matériel biologique qui se serait naturellement détaché du corps de l'intéressé". Autrement dit, iels peuvent récupérer votre ADN par des objets qui le contiennent. Certains retours d'expérience montrent qu'iels n'hésitent pas à mentir pour en récupérer : par exemple en proposant de récupérer une brosse à dent chez vous pour pouvoir vous brosser les dents en gav, en demandant de mettre un masque sans vous dire qu'iels vont le récupérer pour l'ADN ensuite, en faisant croire à un test covid pour vous mettre un coton tige dans la bouche... Même s'il parait donc difficile d'y échapper si iels le veulent vraiment, mieux vaut rester très méfiant là-dessus pour tenter d'éviter leurs combines.

Condamnation de la France pour prise abusive d'ADN : où en sommes-nous ?

- Par une décision du 22 juin 2017, la Cour Européenne des droits de l'Homme a condamné la France en raison de la durée de conservation des données, de l'absence de possibilité d'effacement, mais surtout de l'absence de distinction dans la conservation des données selon la gravité des infractions.

- Dans deux arrêts du 22 septembre 2021, la Cour de cassation avait énoncé le principe selon lequel les poursuites pour refus de prélèvement ADN devaient faire l'objet d'un contrôle de proportionnalité par les tribunaux. Les tribunaux inférieurs (tribunaux correctionnels, cours d'appel) sont tenus par les décisions de la Cour de cassation, et doivent donc effectuer ce contrôle.

- Afin de se mettre en conformité avec la décision de la CEDH, la France a modifié sa législation via un décret du 29 octobre 2021, faisant varier la durée de conservation de l'ADN selon la nature et la gravité de l'infraction (c'est surtout cette absence de proportionnalité qui était reprochée).

- Depuis cette modification, la CEDH n'a pas été saisie sur ce sujet, donc on ne sait pas si la nouvelle législation y est conforme :-/

- Un arrêt de la Cour de la Cour de Justice de l'Union Européenne du 26 janvier 2023 a considéré que la collecte systématique des données biométriques (empreintes) et génétiques (ADN) de toute personne mise en cause violait une directive européenne protégeant la vie privée. Même si cette décision a été rendu dans le cadre d'une affaire bulgare, on peut considérer que la procédure française ne respecte pas non plus la directive en question, et les juges français sont tenus de suivre cette jurisprudence européenne. C'est donc un argument de plus pour se défendre en cas de poursuites.

Source : c'est par ici et par ici !